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Que sera notre monde dans 20 ans?

Environnement

Réchauffement climatique : pas de panique, mais de l'action S.V.P.

«Le changement climatique menace les ressources vitales pour les populations humaines partout sur la Terre — l'accès à l'eau, la production de nourriture, la santé et l'utilisation du sol et de l'environnement.» S'il y a bien un sujet qui provoque des angoisses par rapport à l'avenir, c'est bien l'environnement. Les scénarios apocalyptiques se multiplient, et on vient à se demander si les prochaines décennies amorceront le début de la fin pour l'espèce humaine...

Ce serait une fin un peu prématurée, selon Alain Royer, spécialiste de l'étude de l'atmosphère par satellite : «On parle beaucoup d'événements climatiques extrêmes, mais leur caractère “extrême” est en fait relatif à notre degré de préparation, dit le chercheur. Dans les prochaines décennies, si nous enfouissons les fils électriques, si nous déplaçons les maisons situées trop près des berges et si nous adaptons nos normes de génie civil pour que, par exemple, nos égoûts puissent recevoir des pluies plus abondantes, nous ne vivrons pas nécessairement de cataclysmes.»

Alain Royer est professeur titulaire au département de géomatique appliquée et directeur du Centre d'applications et de recherches en télédétection (CARTEL).
Alain Royer est professeur titulaire au département de géomatique appliquée et directeur du Centre d'applications et de recherches en télédétection (CARTEL).

Cela dit, Alain Royer ne voit pas pour autant l'avenir avec des lunettes roses. Il prévoit que le climat va effectivement se réchauffer au cours des 20 prochaines années et au-delà. Pour l'ensemble du siècle en cours, le réchauffement estimé au Québec est de 3 à 6 ºC. Au fil des ans, il faut s'attendre à des canicules plus fréquentes et à des épisodes pluvieux plus intenses. L'hiver sera moins froid, mais les tempêtes laisseront plus de neige au sol... qui fondra toutefois plus tôt au printemps.

Quel sera le bilan de toutes ces transformations? Difficile à dire pour le moment. Dans 20 ans, «nous devrions comprendre le climat bien mieux qu'aujourd'hui», répond Alain Royer. Présentement, on a du mal à prévoir les effets de rétroaction. Par exemple, le réchauffement climatique, dû principalement au CO2 dans l'atmosphère, permet aux plantes de pousser plus vite et plus tard en automne. Comme les plantes absorbent du CO2 dans le processus de photosynthèse, une croissance accélérée et prolongée des plantes devrait en théorie ralentir le réchauffement. Autre exemple : la fonte des neiges et des glaces dans le Grand Nord devrait s'accélérer en raison du réchauffement climatique. Mais le réchauffement devrait en même temps provoquer plus de précipitations de neige dans cette partie du globe, ce qui a aussi pour effet de refroidir l'air...

Hardy Granberg est professeur agrégé au département de géomatique appliquée de la Faculté des lettres et des sciences humaines.
Hardy Granberg est professeur agréé au département de géomatique appliquée de la Faculté des lettres et des sciences humaines.

Un collègue d'Alain Royer, le professeur Hardy Granberg, du département de géomatique appliquée, croit même que nous avons surestimé le rôle du CO2. À son avis, le réchauffement climatique (qu'il constate aussi) viendrait en bonne partie de la coupe des forêts qui, en modifiant la teneur en humidité de l'air, perturbe le cycle naturel de réchauffement et de refroidissement de l'air. Malgré ces différences d'opinion sur les rôles respectifs joués par les différents facteurs, le professeur Granberg est d'accord avec Alain Royer sur un point : «Ce qui est sûr, c'est que dans 20 ans, nous comprendrons beaucoup mieux l'atmosphère terrestre et la dynamique climatique.» Bref, les spécialistes du climat ne chômeront pas au cours des 20 prochaines années!

Une lueur d'espoir

Dominique Drouin est professeur agrégé au département de génie électrique et de génie informatique.
Dominique Drouin est professeur agré au département de génie électrique et de génie informatique.

Mais a-t-on vraiment le temps de trouver des réponses à toutes ces questions? M. Royer est optimiste; il croit que l'humanité va bouger avant qu'il ne soit trop tard, tout simplement parce que, comme il est écrit dans le rapport Stern cité au début du texte, le réchauffement climatique entraînera des coûts tels qu'on ne pourra rester les bras croisés. « Même la Chine, qui retarde les négociations pour le moment, finance de nombreuses recherches sur le changement climatique, explique M. Royer. Le pays subit déjà les conséquences de son développement rapide, comme les tempêtes de sable causées par la désertification, qui vient elle-même de la surutilisation des sols. La Chine va bouger, c'est sûr.» Il y a donc de l'espoir, à condition de faire les bons choix.

Chloé Legris est diplômée de l'Université de Sherbrooke, en génie mécanique (2000). Elle travaille à l'ASTROLab du parc national du Mont-Mégantic.
Chloé Legris est diplômée de l'Université de Sherbrooke, en génie mécanique (2000). Elle travaille à  l'ASTROLab du parc national du Mont-Mégantic.

«Dans 20 ans, répond à son tour Chloé Legris, de l'ASTROlab du Mont-Mégantic, on vivra dans un univers extrêmement technologique. Je pense que la technologie servira à améliorer le sort de la planète : on aura des voitures électriques, des maisons autonomes sur le plan énergétique, etc. On laissera aussi plus de place aux collectivités qui utiliseront les ressources locales comme la biomasse, plutôt que de construire de nouveaux barrages. Mais il faut être réaliste : on ne va pas réduire notre consommation, on va seulement réduire l'impact de la consommation sur l'environnement. Les jeunes d'aujourd'hui géreront beaucoup mieux les ressources naturelles que nous, mais en même temps, ils baigneront dans un univers très technologique, un peu comme au Japon, et ils auront un rapport plus distant avec la nature. »